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FILM PROJECT ON THE PROS AND
CONS OF THE ROCK MUSIC WORLD
How about having a major film based on the following short
(a bit teasing) story. I'd really like to find a team of seasoned professionals
willing to face the music. Work in Amsterdam mignt be necessary.
This story remains the property of the author. You shall not exploit it (which means
all or parts of it) without requesting and receiving his written authorization.
FILM SUR DES ASPECTS PLUS OU MOINS ÉVIDENTS
DE MONDE DE LA MUSIQUE ROCK
DX est une nouvelle qui pourrait inspirer un film excitant, utile et un peu
agaçant. Je souhaite qu'une équipe de professionnels chevronnés s'y intéresse et
décide de faire face à la musique. Une collalbortion avec Amsterdam pourrait être
nécessaire. Tous droits réservés.
Info - administration@laidley.com
DX38(2x1027)
par Gilles Dignard
Une directive ? On a attaqué un mâle. Depuis je ne sais où, par un moyen invisible. La
nuit, en mars 1972. On le tient maintenant par le point 1Z.8 du cerveau.
Cet homme travaillait dans une chambre située à l'intérieur d'un imposant immeuble aux
murs de granit. L'incident survint pendant qu'il procédait à des essais en matière de
techniques d'émission et de réception de messages télépathiques. Dès cette agression,
notre personnage, BON, dorénavant indissociable de la source interférente, s'est mis à
véhiculer une deuxième réalité qui, dans ces circonstances, l'a plongé brutalement
dans un monde de science-fiction. Il convient donc de le rebaptiser puisqu'il est devenu
autre, soit DX, agent relié, c'est le cas de le dire, à une organisation inconnue et
ultrasecrète, bien entendu. Entre vous et moi, comment ne pas penser immédiatement à
une autre triste et insolente affaire de moyens inavouables pour parvenir à certaines
fins.
A priori, DX fut hostile à cette intervention qui implique une forme de contrôle
embarrassant, grossier, physique dans un premier temps, mental dans un second. Il décida
aussitôt de s'organiser pour s'en libérer, supposant que, avec le temps, il y
parviendrait.
Le matin se lève. Sur un pupitre de sa chambre, il y a La vie des maîtres, un livre
écrit par Baird T. Spalding. Cet auteur fait allusion à des documents, d'assez longs
écrits philosophico-théologiques, qui remonteraient à plus 30 000 ans (situons-nous,
Adam, le premier homme (!), celui de la Genèse de la Bible, a moins de 10 000 ans
d'existence). Que faut-il donc franchement penser de l'édition française récente de
l'ouvrage de Spalding ?
DX quitte sa chaise, fait sa toilette, descend pour le petit déjeuner et décide ensuite
de partir pour la ville.
Chemin faisant, il pense aux problèmes de son nouvel état physique : « Suis-je victime
d'une intervention involontaire ou pas ? Des techniques d'une éventuelle guerre
électronique seraient-elles en cause ? Qu'adviendra-t-il de mes recherches ? Mes
conditions de travail se détériorent. J'avais besoin d'approcher du silence extérieur,
d'écouter MON corps, d'étudier MES sons ; me voilà avec un problème scientifique de
plus : l'occupation de la zone 1Z.8 changera quoi ? Quelqu'un voudrait peut-être que je
fasse autre chose. QUI ? Il s'impose. Il s'en prend secrètement mais efficacement à MA
LIBERTÉ, ce qui, quant à moi, soulève une très grande question de principe. » Les
idées s'accumulent : « Soit qu'on veuille savoir ce que je pense, se dit DX, ou qu'on
veuille m'utiliser bon gré mal gré (quelle horreur !). Pour communiquer des messages ?
Temporairement ? Ou tant que mon corps tiendra le coup ? De quel droit ? La méthode de
recrutement me paraît hautement contestable -- n'aurais-je pas affaire à une de ces
organisations qui a plus d'ambition que d'argent (il n'a pas été question de salaire).
Décidément, j'ai peine à déceler les signes d'une société avancée que je souhaite.
»
Après deux heures de trajet, DX arrive à destination. On le voit stationner son
automobile près de son appartement.
Presque aussitôt rentré, DX écoute du Jean-Sébastien Bach, car même si, depuis 1968,
il plonge de plus en plus dans le rock, il reste fidèle à Bach, qui lui fait du bien.
Pendant que le son l'accompagne, DX poursuit ses réflexions : « Un travail forcé à ce
moment-ci de l'histoire m'étonne, mais la façon d'y être contraint me surprend encore
davantage. En cas d'urgence, dans l'exercice de pareilles fonctions, à quel chef
recourt-on ? »
DX repasse mentalement son programme d'activités : des spectacles à monter, des articles
à écrire, une série de bandes vidéo à réaliser, des lectures à terminer. Conclusion
? Essayer de tout faire quand même, en dépit de l'accrochage du 1Z.8 du cerveau ? Le
doute s'empare de lui. Fatigué, il s'étend et s'endort.
Un peu plus tard, il se réveille. Voici son premier réflexe : « Dans ces nouvelles
conditions de vie, d'où viennent toutes les idées que j'ai ? Prudence. Plus qu'avant, je
dois bien choisir celles que je retiens ! Mais je me rassure à l'idée que, de toute
manière, je ne crois pas qu'un humain soit actuellement capable de contrôler
physiquement, à distance, complètement et constamment, un autre humain vivant. Ainsi,
deux facteurs joueraient en ma faveur. La possibilité théorique de déjouer
intentionnellement et le hasard, c'est-à-dire, la possibilité de déjouer
accidentellement. Je veux circonscrire ce à quoi je suis rattaché. Pour les besoins de
la cause, je donne un nom à ce supérieur invisible : SATU. »
DX prépare son repas du soir en étudiant encore la situation : « Ce contrôle physique
à distance permettrait à de sombres personnages de manipuler des enfants -- pauvres
petits anges --, de quoi déclencher des luttes sans merci contre une science aussi
infâme ! Quelle sorte de règlements judiciaires aurions-nous : pas facile de trouver
tous les coupables. Et qui serait le plus coupable : l'instigateur invisible ou
l'exécutant, par exemple, un adolescent au sens critique peu développé ou un jeune
terroriste plus ou moins bien documenté ? Nous aurions quelles sortes d'accidents : DES
APPARENCES DE HASARD ? Je me méfie. Voilà que, songeant à des mesures préventives, je
suis poussé à vendre mon automobile ; quelque part quelqu'un profitera de ma décision ;
quelque part, à cause d'elle, une industrie perdra. OH ! Quel système économique gagne
? « Jusqu'à maintenant, je parlais de mon intuition, de mes désirs. Dorénavant, ne
m'enverra-t-on pas des suggestions ? Avec circonspection, je devrai faire du triage ? Mais
plus j'y pense, plus cet état de fait me permet d'entrevoir rien de moins que l'arrivée
du CLIENT AUTOMATISÉ.
« J'invente des exemples qui illustrent à quoi mènent les données fondamentales que je
viens de découvrir ; j'imagine certains stades de ce monde plus ou moins télécommandé.
Le président d'une foire commerciale demande à l'agence de publicité ARTANOS de lui
envoyer 10 000 beaux jeunes excités pour 20 h et il les a.
Les sociétés SOAS et TAFIA sont en guerre : la plus habile s'emparera d'un organe donné
au sein de tout un groupe de consommateurs de produits alimentaires.
Des ententes : on vous PERMET DE RÉUSSIR le projet BE+1. Les jeux sont faits.
Des pépins : un automatisé s'éloigne du programme ; on le place sur la liste des
malades. N'ayez crainte, vous aurez un diagnostic.
Les relations sexuelles. KKK£69 doit absolument se joindre au Parti ZINEX s'il veut avoir
droit à ses ébats. Autrement, on le blessera au bon endroit et, n'en doutez pas, il
finira à l'hôpital.
L'écrivain ne peut plus travailler. Il créait dans la maison T.C1.P99.V333.Z4.E222, et
les autorités ont donné l'ordre de tout désynchroniser.
Un imprévu. On a besoin d'enfants. On passe une commande. Trois heures plus tard, le
processus est en marche avec cinquante couples de la liste d'attente.
Le nouveau type de vendeur affirme : « Cette propriété vous intéresse ? Fiez-vous à
moi. Elle sera vôtre. Je vous assure que les propriétaires voudront s'en défaire en
moins dans trois heures. »
Les élections ? Presque un jeu d'enfant. Les électeurs réagissent à peu près comme on
le prévoit, et ce, depuis cent ans. L'efficacité a ses victoires... Il nous faut
néanmoins continuer : notre moyenne n'est que de 93 pour 100.
Le Parti ZUTA réclame le célèbre organisateur politique JO. La campagne l'exige. Un
refus et on lui brûle 1 pour 100 du cerveau. »
Quelle détestable perspective ! DX n'a jamais cru que pareil système pût faire son
bonheur, et il ne change pas d'avis en 1972. Pratiquement, il admet que, pour lui, et
aussi incroyable que cela paraisse, pareille heure vient de sonner. Il se sent
homme-machine. Mince alors ! Au premier coup d'oeil, DX a conclu que cet accrochage
pouvait être le fruit d'une collaboration entre des ingénieurs et des médecins. La
liberté ne serait-elle plus qu'une utopie ?
Il se livre à la spéculation et s'arrête enfin à un point particulier : « Si je
contre-attaquais ! Puisque le corps est visé, faisons appel à ceux qui le connaissent.
Je crains qu'il faille décider de sortir la médecine des coulisses afin qu'elle prenne
officiellement la direction de l'humanité. »
Il imagine donc le GRAND CONSEIL PLANÉTAIRE : une équipe médicale, disons la plus
savante (probabilité de 6 sur 10), formée de trente-trois PRINCES DU SAVOIR,
soigneusement dirigée par un des membres : « probablement » le plus respecté. OBJECTIF
DU GRAND CONSEIL : LA QUALITÉ DE LA VIE SUR TERRE d'abord, ailleurs ensuite. Sous le
GRAND CONSEIL, le GRAND ADMINISTRATEUR - PLANÈTE et le CABINET MONDIAL, formé de
CHARGÉS.
Les chargés : des Abris ; de l'Air ; de l'Alimentation ; des Animaux ; des Déplacements
; du Droit ; de l'Eau ; de l'Économie ; de l'Énergie ; des Équipements ; du Feu ; de la
Garde ; de l'Identité ; des Insectes ; de l'Instruction ; des Loisirs ; de la
Main-d'oeuvre ; des Micro-organismes ; des Relations intergouvernementales ; des Religions
; des Soins aux malades ; du Sol ; des Tâches ; des Vêtements.
Au terme de sa réflexion, DX hallucine presque ; il distingue les traits imprécis d'un
génie qui lui fait penser à Aladin. DX, qui a publié neuf romans, retient ce personnage
et le nomme WAWA, théoricien fantomatique qui reviendra dans son imaginaire.
Le téléphone sonne. DX répond. Une fille... La fille qui, à la suite de la parution
d'un des articles de DX, voulait le rencontrer. Elle rapplique... DX se souvient des
détails de la visite de cette fille. Une disciple de Priape ? Elle s'est présentée avec
une collection de tels dessins ! DX s'excuse, lui dit qu'il n'est pas libre, la remercie
de son appel et raccroche. Il chantonne :
N'importe qui
Ne peut faire
N'importe quoi
N'importe quand
N'importe où
N'importe comment
Pour n'importe qui
Tatame, tute, tatame...
Il sourit largement.
Début de juin 1974 : un peu plus de deux ans plus tard. (Je vous expliquerez plus loin en
quoi ce laps de temps fut fertile en rebondissements). Que de différences depuis 1972 !
Et on ne les voit pas toutes. Le visage de DX est changé. Quelle pâleur !
Il est assis et semble fort faible. Il a terminé une partie de ses travaux. Les
productions magnétoscopiques se vendent bien ; il l'apprend à l'intervieweur avec qui il
bavarde en s'installant devant les caméras de télévision d'une université. L'interview
débute. DX répond aux questions qui portent sur le rock. Il redit que de nombreuses
compositions interprétées par les compositeurs eux-mêmes l'attirent ; que les émotions
sont nombreuses à un concert de musique rock ; que cette forme de musique populaire
réussit énormément, qu'elle convient à notre temps; qu'il y a place pour
l'improvisation ; qu'elle permet la création collective, l'expression d'un talent
collectif. C'est un secteur culturel, industriel et commercial qui satisfait sa clientèle
; il est porteur d'espoir dans un monde qui en a besoin. DX ajoute qu'il respecte
particulièrement les démarches musicales de certains groupes d'Angleterre et des
États-Unis.
Un art sans dangers ? Non. N'oublions pas que les sons peuvent blesser et, avec le temps,
nuire au bon fonctionnement de certains organes. Pour ces raisons, et d'autres, ces
concerts peuvent donner prise à des accusations de négligence criminelle.
DX s'est joint au mouvement afin de résoudre certains problèmes nationaux : besoins de
revenus, d'emplois, de beau, de nouveau ; nécessité de s'attaquer au déséquilibre
entre importations et exportations dans le domaine du rock. Tout compte fait, il
s'agissait d'une double réaction : emboîter le pas (le domaine de la musique rock est
très intéressant) et se défendre (c'est un forme d'invasion). Que de difficultés ne
faut-il pas surmonter pour se tailler une place dans ce réseau international qui a ses
lois. Amener des ethnies à s'intéresser mutuellement par le rock, quel défi passionnant
!
Vers 1970, DX pensait au marché francophone : environ 79 millions de personnes devant
quelque 300 millions d'anglophones... Une stratégie commerciale consistait à aborder le
marché anglophone avec « la crème », à savoir, avec certains des artistes qui
auraient remporté les plus grands succès sur le marché francophone. DX n'était pas
très naïf. Vouloir ne suffisait pas ; il n'oubliait pas les difficultés auxquelles
s'était heurté le long métrage canadien de fiction. À tort ou à raison, il avait
décidé d'investir dans le rock.
L'intervieweur passe à d'autres questions ; elles portent sur DX, écrivain, mais nous
quittons les lieux.
Juillet 1974, un mois plus tard. DX voulait une réunion du groupe rock à 22 h. Les gars
sont tous arrivés à 21 h 50, et la réunion commence après les premiers échanges
verbaux. DX rappelle que NOTE, RAM, MEG, ROM et DAT constituent le noyau du deuxième
groupe avec lequel il travaille. Le premier groupe ayant conduit au chômage, DX dut le
quitter. Il tient à ce que le rock rapporte beaucoup d'argent, sans quoi, ce sera
l'échec des jeunes du pays. Il indique aux membres réunis qu'il est plutôt satisfait
des revenus récents : 444 000 $ pour 80 spectacles. Ainsi, tous les membres vivent
convenablement avec leurs proches. Ils peuvent en outre aider quelques personnes dans le
besoin. Comme le groupe en est à ses débuts, il doit son succès actuel à ses
activités au niveau provincial. Bien qu'il y ait lieu de s'en réjouir, ces musiciens
sont très loin d'avoir dépassé les grandes vedettes mondiales du rock. Il reste donc
beaucoup à faire.
DX aime ses jeunes hommes ; ils ne passent pas leur temps à se plaindre des conditions
défavorables, ni au verbiage ; ils ont du coeur, travaillent fort ; ils sont réalistes
et gagnent tout simplement leur vie avec les moyens du bord. Bien sûr, ce sont de gros
fumeurs et, pour eux, la chimie est un outil des plus utiles.
DX en vient à l'objet principal de la rencontre. Il leur apprend que, tout positif que
soit le bilan, il doit s'éloigner d'eux car de nouveaux problèmes de sécurité se
posent et, pour l'instant, ils sont insurmontables.
La première surprise passée, chacun parle un peu, puis DAT suggère d'écouter un
nouveau produit de la British Invasion (l'invasion britannique -- période qui s'amorce
avec les Beatles). Le disque contient de nouvelles normes de qualité artistique et
technique dont les concurrents doivent tenir compte afin de réussir sur le marché
mondial.
Après l'audition de cette splendeur musicale, les gars manifestent néanmoins du
désagrément. MEG demande à DX si sa décision est liée à son état de santé. DX
répond que oui, mais qu'il cherche surtout à réaliser un projet qui lui est cher; que
souvent, dans la vie, il y a lieu de se réorganiser pour déboucher sur du potentiel.
Puis, il cesse de jongler avec ses idées et il dévoile son projet. Il a décidé de
fonder une MAISON DU ROCK (studios de répétitions, salle de concert, collection
d'enregistrements, bibliothèque, services administratifs et médicaux). Tout cela sera
offert aux chercheurs, aux personnes qui savent trouver, qui trouvent assez. Les gars sont
manifestement soulagés et ne cachent pas leur vif intérêt. Pas surprenant me
direz-vous. Sachez que beaucoup de groupes n'aiment pas ce genre de services ; en effet,
il y a des inconvénients à travailler ailleurs que chez soi. La réunion prend fin, DX
les salue et ils partent.
Avant de se coucher pour la nuit, DX consacre du temps au magazine Rolling Stone.
Août 1974. Nouvelle réunion. Les gars embarquent, ils seront rattachés à la MAISON DU
ROCK pour une première période de trois ans. Plusieurs sujets sont abordés, dont la
tournée d'un groupe qui jouerait un jour dans tous les pays membres de l'Organisation des
Nations unies.
DX révèle un nouveau volet de son plan, celui-là relatif à la drogue. Il milite en
faveur d'un nouvel esprit, l'autre ayant fait son temps (n'insistons pas, la liste des
noms des musiciens et des chanteurs qui ont connu des fins tragiques est d'une longueur
considérable, et, les manchettes ne manquant pas, aucun politique sérieux ne peut
invoquer l'ignorance pour justifier son inaction). C'est pourquoi il a demandé et obtenu
d'un ministre une autorisation valable pour vingt ans : les groupes pourront utiliser
certaines drogues (le service médical de la MAISON DU ROCK se chargera du contrôle de la
qualité des substances, du dosage et des rapports relatifs aux essais). Les travaux
seront scientifiques à plus d'un titre -- l'ouïe et l'alimentation seront incluses.
En dernier lieu, l'espionnage militaire et commercial ainsi que le sabotage retiennent
l'attention des participants. DX indique clairement que tous continueront d'y être
exposés, qu'il n'est pas en mesure de protéger qui que ce soit (les moyens techniques et
financiers de l'espionnage national et international dépassent très largement les
siens). À la fin de la rencontre, tout le monde se quitte en se disant bonsoir.
DX, en rêve cette fois, n'a pas de mal à revenir au monde imaginaire de WAWA. Quand il
veut l'entendre à propos du GRAND CONSEIL PLANÉTAIRE, WAWA articule nettement ceci : «
Souviens- toi, un jour, les seigneurs féodaux ont dû accepter une monnaie nationale.
Quel choc ! Au XXe siècle, le féodalisme s'est hissé au niveau mondial, c'est-à-dire
que quelques grands seigneurs, les chefs d'États, ont chacun leur monnaie. Le cercle
s'est simplement élargi. Il est donc logique que tous les États renoncent maintenant à
leur pouvoir de battre monnaie -- décision à la portée de tous les budgets -- et le
remette aux autorités mondiales. En revanche, le GRAND CONSEIL financera tous les pays,
tout en réduisant rapidement les dépenses militaires. Le CONSEIL doit s'imposer deux
critères incontournables : il faut toujours qu'un projet soit RÉALISTE et SOUHAITABLE
pour l'humanité. Une faiblesse persiste : le GRAND CONSEIL ne saura pas tout de tout ce
qui existe. »
Fort de ce dernier commentaire, DX a toujours l'intention de poursuivre certaines
activités dans son milieu.
Le dialogue continue. DX, qui n'a pas à craindre d'ennuyer son interlocuteur, passe du
coq à l'âne et confie à WAWA que la sexualité des jeunes et de nombreux adultes le
préoccupe. « Qui refuse d'avoir des relations sexuelles peut peiner, fâcher ; qui
accepte, contracter une maladie. Est-il vital de trouver la satisfaction sexuelle ? De
quoi est-elle faite ? Quelles sont ses effets ? Comment réussir avec le plus grand nombre
de personnes ? Il y a tant de conflits perdurables entre les milieux religieux, médicaux
et politiques ; ne faut-il pas plus de cohérence ? » WAWA répond que dans ce cas comme
dans d'autres, quelqu'un ne doit pas éliminer des solutions surprises, celles qui
viendraient du cosmos, par exemple, et permettraient de procéder à des améliorations
inattendues du corps humain. « Je ne les ai pas écartées, répond DX, mais je suis
extrêmement sérieux et terriblement exigeant quand j'aborde l'extraterrestre.
L'humanité a déjà tant de fois fait fausse route à cause de la multitude d'histoires
qui ont circulé. »
Octobre 1975, donc environ un an plus tard. Ce soir, DX assiste à un spectacle rock (on a
vendu exactement [!] 45 013 billets) ; RAM a téléphoné depuis la MAISON DU ROCK pour
lui apprendre que le chauffeur passera vers 16 heures. À l'heure prévue, la limousine
arrive, précédée de l'Unité mobile de télécommunication.
Cette fois-ci, attention. À l'interview de 1974, DX semblait « fort faible » ; il y a
certainement eu des complications car, ici, il marche avec peine et à l'aide d'une canne.
On se met en route ; il faudra un bon moment avant d'arriver.
Parvenu à l'intérieur de l'immeuble où doit avoir lieu ce spectacle, DX constate que
les essais techniques se poursuivent sans interruption ; tout le monde est occupé.
Vers 18 h, DX et quelques musiciens du groupe se libèrent afin de se rendre à une
réception intime.
De retour, tous se remettent aux préparatifs : ici, ce sont les vérifications, les
derniers conseils distribués à la hâte derrière la scène ; là, certains sont
affairés dans les loges. Qui ne sent pas le désir de commencer ? Puis, finalement, c'est
prêt !
DX s'éloigne, se mêle à la foule -- c'est le milieu qu'il préfère durant un
spectacle. Il observe tout ce qu'il peut. Les idées continuent de défiler : la dose de
concentration qu'il faut trouver pour réussir dans cet art ; la présence d'esprit dont
il faut faire preuve quand survient un imprévu ; et ces idéaux à ne pas perdre de vue :
toucher le public profondément, agréablement...
DX plonge dans ses souvenirs, il revient à juin 1974, ce qui nous reporte à quelques
heures de l'interview : « Mon téléphone a sonné. Un homme sollicitait un rendez-vous
pour deux personnes chargées d'une mission importante et urgente. Je les ai rencontrées
le même soir, à mon appartement. »
Les minutes passent. DX écoute la musique et regarde le spectacle ainsi que la foule. Que
penser du spectacle en cours ?
En bon train.... ........... ........... ........... ...........
DX fait le saut. Le tonnerre.
Un tonnerre d'applaudissements. Le spectacle est terminé. CHANTS... SAUTS... CRIS. Il
entend : « ENCORE... ENCORE ! » Un premier rappel. Un second. Et c'est la fin.
Une heure plus tard, voyant les aides s'occuper de l'équipement, DX constate une fois de
plus qu'il y a beaucoup de pièces dans ces machines -- beaucoup de risques --, que
certaines sont trop volumineuses, trop lourdes. Il espère que les ingénieurs trouveront
de meilleures solutions que celles-là.
Changeons de propos. Voici venu le moment de présenter un bref historique.
On voit paraître un narrateur à l'écran ; il fournit quelques explications susceptibles
de nous en apprendre sur DX : « Il faut savoir que cet agent a traversé une période
extraordinaire, mais pénible. Si cette étape a peut-être commencé par l'occupation de
la zone 1Z.8, DX constata d'autres accrochages dès 1972 : une attaque douloureuse de la
zone 5Z.3 de l'intestin (soit dit en passant, son dossier médical nous permet de nous
demander si certains problèmes antérieurs, en 1965, ne devraient pas être réexaminés
afin de faire la lumière sur la cause réelle de certaines complications). Quoi qu'il en
soit, ce fut ensuite un malaise au point 1R.7 de la colonne vertébrale. En 1973, la
technique s'en prit à son poumon droit, à deux endroits, puis à l'oeil droit et, enfin,
à quelques dents. Vers la fin de 1973, il captait directement par les oreilles --
c'est-à-dire sans appareil émetteur connu autour de lui -- certains petits sons ou
signaux qui l'importunaient ; la paix n'était toujours pas revenue. Il voulait voir un
spécialiste afin de les faire enregistrer, à supposer que ce fût possible. Il a
souffert. Son corps fonctionnait de plus en plus mal. Approchant de l'épuisement, DX dut
renoncer à plusieurs activités, assumer plusieurs pertes financières importantes. Il
perdit la confiance de quelques investisseurs et collaborateurs. Il craignit pour sa
famille -- en effet, si on l'avait attaqué et harcelé, on pouvait en attaquer et en
harceler d'autres. Il devenait, graduellement, et malgré sa très grande discrétion
quant à ses difficultés, une source d'inquiétude pour son entourage -- on sentait bien
que quelque chose ne tournait pas rond.
« D'autres faits. DX remarqua des interférences suspectes des ondes (radio et
télévision) et le fonctionnement inhabituel de machines automatiques chez lui ; à deux
reprises, on lui servit des boissons droguées ; l'écoute électronique fut pratiquée,
et, ainsi, on lui vola des renseignements ; trois envois postaux ne fonctionnèrent pas
comme ils le devaient, ajoutant à ses inquiétudes.
« Somme toute, de quoi se sentir surveillé, mais surtout, ennemi. C'était comme si
quelqu'un multipliait les obstacles visant à contrer une partie de ses efforts. Très
précisément, pourquoi ? Situation fort délicate puisque DX ne pouvait absolument pas
PROUVER TOUT ce qui s'était passé. »
« Chemin faisant, DX s'est dit à plusieurs reprises : " Je continue. Je m'oppose au
contrôle physique tel qu'il m'a été présenté. On me menace sérieusement. On en
menacera d'autres un jour. La technique peut servir contre des collectivités. Je vois
tous les ingrédients d'un ou de plusieurs génocide(s) à l'horizon. Qui dirige cette
approche et depuis où ? " »
L'animateur ajoute : « Mesdames, messieurs, au moment où je vous parle, DX est-il la
seule victime ? Sinon, je vous le demande, où et qui sont les autres ? Combien sont-elles
? »
Le visage à peine éclairé de DX remplace le narrateur à l'écran. Il ajoute : « J'ai
cherché des réponses à mes questions. Notre système de communication était
incontestablement utilisé. Je me suis déplacé d'un bout à l'autre du pays ; j'ai
séjourné des semaines entières en forêt ; je suis allé à l'étranger. Partout, je me
sentais retenu physiquement. J'ai identifié des centres de responsabilité sociale ? La
sécurité nationale : c'est un des mandats du gouvernement canadien. Plus haut,
légalement, je vois la Grande-Bretagne. Ensuite, à cause d'ententes spéciales et des
spécialités qu'on y trouve, je pense aux États-Unis. Autre hypothèse : à cause de
certaines particularités de son programme spatial, la Russie contrôlerait-elle quelque
chose en Amérique ? En dernier lieu, les Nations unies. Après, plus haut...?
« Mon corps allait flancher. Il flancha le 2 février 1974. Hospitalisation. En quatre
mois, trois interventions chirurgicales. Les limites communément admises en ce pays
étaient dépassées. Je me disais : " Bon sang, si j'avais eu affaire à des gens
d'honneur, j'aurais reçu des explications. " À regret, je me sentais obligé de
songer à une retraite prématurée, à une tour d'ivoire ; puis, pensant à Howard
Hughes, j'ai trouvé que cette dernière solution ne merassurait pas du tout. »
Vous vous souviendrez que pendant le concert de juin 1974, DX pensa au rendez-vous de deux
personnes chargées d'une mission importante et urgente.
Revivons cet épisode.
Récapitulons d'abord : DX subit sa dernière intervention chirurgicale, mineure, le 12
mai 1974, et l'interview eut lieu le 1er juin. Eh bien, le 4 juin 1974, il s'apprête à
recevoir ses deux visiteurs.
Quand on sonne, DX marche très péniblement, sa canne à la main, en direction de la
porte. Il l'ouvre, CENT ainsi que MIL apparaissent. Après les présentations, ce sont des
diplomates, ils entrent en examinant poliment les lieux. Parlons un peu de la pièce, des
raisons pratiques qui ont présidé aux choix de DX. Il n'a jamais aimé la saleté et ne
veut pas qu'on consacre beaucoup de temps au nettoyage chez lui ; alors, tout s'y nettoie
facilement et, fait habituel au salon, tout est propre. CENT, visiblement bien informé
(!), s'étonne de trouver DX en si bon état. CENT et MIL s'expliquent : ils représentent
des gouvernements qui, s'ils ne peuvent répondre de tout ce qui a pu affecter DX, se
sentent en mesure de jeter un éclairage utile sur une partie des incidents. Les envoyés
lui confient que, par suite d'un accrochage, un des systèmes de communications
intercontinentales a blessé quelques personnes. L'enquête qui a permis d'aboutir à ces
conclusions a été assez longue, fertile en rebondissements, extrêmement délicate, mais
profitable. Les deux hommes s'excusent du délai, l'assurent qu'il leur était impossible
de le visiter plus tôt. Bref, ils peuvent le soulager en lui offrant 72 millions de
dollars canadiens SI il consent à régler sans faire des tas d'histoires. C'est ce que
leurs supérieurs souhaitent puisqu'il y a urgence internationale en plusieurs matières.
Intrigué, DX veut entendre parler du mode de financement. CENT répond : « Je n'ai pas
tous les détails ; je sais toutefois, et cela peut sembler étonnant, que cela ne coûte
rien aux gouvernements en question. Je puis exposer certains des principes utilisés.
Disons que pour régler avec un minimum de bruit, on a passé par les budgets des services
secrets. Les États du groupe ont versé temporairement leurs parts dans un compte
extraordinaire qui a été confié à des mains sûres, capables de le faire fructifier,
et ce, le plus rapidement possible, en prenant des risques raisonnables. Depuis, les
revenus du compte ont permis de rembourser l'argent des États, y compris des intérêts,
et de payer des victimes. L'opération se poursuit. »
DX leur fait sentir que son intelligence se porte mieux et demande du temps pour
réfléchir. On lui en a accorde. Notre homme n'est pas enthousiaste intérieurement,
l'argent ne réparant pas son désastre physique. Et on vient de lui servir encore la
vieille raison d'État qui, par le passé, a servi à justifier tant de folies. N'a-t-il
pas quitté officiellement le Renseignement en 1968 par suite d'une choquante affaire
d'agents officieux. Il est furieux, mais se garde bien de manifester ses sentiments car il
tient compte de la politique de la main tendue qui vient de lui être dévoilée, et il
apprécie sincèrement cet aspect du scénario. Il les salue en disant que l'erreur est
humaine, qu'il savait cela quand il était un employé du Renseignement, qu'après les
avoir entendus, il obtient d'eux de bonnes raisons de s'en rappeler.
Après leur départ, DX, étendu sur un divan, fait le point : son corps subit toujours
les effets postopératoires ; il se considère tel un sacrifié nouveau genre, remarquant
que si, sur le champ de bataille, le militaire connaît son employeur, d'autres ne
jouissent pas toujours de cet avantage. Quand, devant certains enjeux, on impose à des
hommes de servir des entreprises mystérieuses qui ne sollicitent pas de consentement
préalable, quand certaines opérations lient par de détestables faits accomplis, les
méthodes ont de quoi dégoûter.
Enfin, pour se détendre, quelques minutes plus tard, il examine à la loupe des
photographies aériennes.
Sur l'écran d'un téléviseur, on voit DX, de dos, composer un numéro de téléphone ;
cependant, en observant attentivement, au haut, à droite de l'image, on voit que DX parle
au diplomate CENT. On entend ceci : « M'appuyant sur vos renseignements, ce 6 juin 1974,
j'accepte votre proposition. » La voix se perd dans l'espace.
C'est donc deux jours après la visite des diplomates que DX accepta leur proposition ; et
c'est elle qui lui permit de fonder la MAISON DU ROCK.
Suit un plan de DX, qui occupe tout l'écran; on le voit, au téléphone. Il attend qu'on
réponde au bout du fil et donne des coups de crayon sur un calendrier -- ce qui nous
permet d'observer que nous sommes maintenant deux ans et demi plus tard, le 31 décembre
1976. DX tente de communiquer avec WINDO, excellent ami en qui il a confiance et qu'il a
placé sur la liste des successeurs hypothétiques à la direction de la MAISON DU ROCK.
Pourquoi l'appeler ? C'est qu'il veut lui faire part de son intention de lui donner la
MAISON.
DX n'est hélas physiquement plus en mesure de bien fonctionner dans le milieu, et il
espère que WINDO acceptera de le remplacer. Ce dernier, après avoir entendu DX, voit
l'offre d'un bon oeil. Reste à conclure l'affaire ; les deux hommes d'affaires se
reverront.
Cette conversation téléphonique est brusquement interrompue.
Nous sommes distraits par une cascade d'effets. Une main, celle de DX, tournant le bouton
du téléviseur, retire ensuite une vidéocassette de l'appareil. Cette fois-ci nous
constatons que ce que nous venons de voir et d'entendre, ce sont ses enregistrements et
son montage de ces scènes.
DX songe à ces agréables souvenirs. Nous voilà en juillet 1980, plus de huit ans après
le début de notre histoire commencée dans la nuit de mars 1972. Déjà !
DX se dirige vers un fauteuil. Il marche maintenant facilement, sans canne, semble en
bonne forme ; il se déplace à l'intérieur d'une structure surprenante : il a fait
construire, à la campagne, un ensemble architectural fonctionnel, original et
soigneusement conçu : sur le roc d'une petite île, dix coupoles d'inégales dimensions,
réunies par des passages couverts. Le tout se trouve près du sommet d'une montagne et le
lac est petit.
Voici ce que renferment ces coupoles : I : Salons ; II : Salles à manger, cuisines ; III
: Centre récréatif ; IV : Jardins ; V : Laboratoires ; VI : Observatoire ; VII :
Bibliothèque ; VIII : Appartements des aides ; IX : Appartements des visiteurs ; X :
Service médical ; XI : Musée et Galerie ; XII : Appartements de DX.
DX travaille à plusieurs choses, reçoit des parents, des amis et des collaborateurs.
On remarque des visages connus dans la pièce : CENT, MIL et WINDO. Tous nos personnages
sont assis. WINDO parle des 13 MAISON DU ROCK qui fonctionnent dans divers pays, des
tournées (la dernière a rapporté 12 millions de dollars bruts en vingt semaines). À ce
jour, les hommes s'avouent satisfaits des ententes. Et puis ils échangent des idées
relatives à cet événement qui se prépare pour 1985. Trois bases de diffusion, avec
spectateurs et très grandes vedettes. Les villes retenues sont actuellement Mexico,
Montréal et New York. Spectacle d'une durée de deux à trois
heures : trois tranches de concerts diffusés en direct depuis les trois villes (pour les
bars du Canada, des États-Unis et du Mexique) : une affaire d'au moins 100 millions de
dollars. WINDO a bon espoir de pouvoir réussir avec ses associés étrangers. Si oui, il
y aura ainsi fête à chaque saison ; si l'affaire fonctionne bien, WINDO organisera du
semblable ailleurs dans le monde.
On change de sujet. DX veut entendre reparler du financement qui a conduit à son
dédommagement. MIL répond : « Ce n'est pas sorcier. Disons qu'un facteur déterminant a
joué en notre faveur : le prix de l'or. »
Et cet « accrochage » dans les communications, qui a fait des ravages ? Qu'il vous
suffise de lire que tous se demandent encore si les chirurgiens et les
chirurgiens-dentistes pourront retrouver leur calme. La réponse est simple ; il fallait
tout bonnement NE RIEN AJOUTER à BON (DX), qui puisse en faire un trouble-fête, un agent
double involontaire. On ne peut blâmer le personnel médical : il installe ce qu'il
reçoit. Mais, une prothèse qui contient « un petit gadget de trop » peut avoir de
très fâcheuses répercussions, nous venons de le voir. Et le mystère n'est pas
complètement éclairci : DX peut affirmer que le dispositif a été activé en mars 1972.
Mais ce dernier n'aurait- il pas agi avant, sans que DX s'en rende compte ? Certains
professionnels bien entraînés ont pu s'introduire dans certains locaux au moment
opportun et installer, à l'insu de tous, un minuscule élément technique susceptible de
faire avancer leur cause. Si un espion faisait ce travail, ce n'était pas parce qu'il
respectait la vie privée, la liberté individuelle ou qu'il avait foi aux mécanismes
démocratiques pour régler les grands conflits de l'heure. Il n'avait qu'à croire, comme
ses chefs, qu'il était bon d'assujettir clandestinement une personne, ou plusieurs, au
moyen de la haute technologie.
Voilà bien pourquoi DX est porteur d'une volonté de ne pas pardonner cela à qui que ce
soit. DX déclare à ses invités : « Je ne crois pas que nous soyons encore en mesure de
nous reposer. En 1980, nous faisons face à de très grands dangers dans le monde ; nous
sommes assis sur un volcan. Quoi qu'il en soit, je veux passer du côté de ceux qui
préparent des offensives. Nous avons besoin de certains signaux politiques.
J'ai quelques plans ? Voici. Je vous lance d'abord des idées qui les justifient :
À tort, on s'acharne à soutenir certains principes qui nous mènent à l'absurde.
On continue de recourir trop fréquemment aux sacrifices humains.
Sauver la face, c'est souvent une solution stupide.
Combien d'intrigues insultantes avons-nous eu en haut lieu dans le monde depuis 30 ans ?
Il y a trop de pauvres sur la planète. Comprenez-moi bien, il ne s'agit pas de faire en
sorte que les riches tombent aussi dans la misère.
Je rêve de pays où il y a peu de lois, mais où elles sont toutes respectées.
« Comme vous venez de l'entendre, nos gouvernements n'ont rien à se reprocher, dit-il
cyniquement. Je continue :
Il nous faut plus de certitudes, prendre les moyens d'y parvenir : plus de découvertes,
plus d'inventions.
Il faut faire davantage pour éviter les risques d'accidents et d'erreurs graves.
Ne manquons-nous pas de grands partis politiques mondiaux très bien organisés ?
Aurons-nous un jour des élections mondiales ?
Aurons-nous une capitale mondiale ? Où ?
« Je n'insiste pas. Réveillées, nos élites ont de quoi s'occuper, de quoi
s'enthousiasmer. Autrement, elles ont beaucoup à perdre. Sachez que la dernière
décennie vient de faire de moi un politicien dans l'âme et que, si je trouve des appuis,
je désire contribuer à l'évolution dans le sens que je souhaite. Je ne veux pas faire
" des tas d'histoires " mais au moins quelque-unes. J'ai un dossier précieux et
je me prépare à foncer. Avant de livrer les grandes lignes d'un de mes plans, je ferai
un petit détour pour vous.
« Supposons que je n'aie plus que mon corps et qu'on ne mette à ma disposition qu'un
mètre carré de terrain. J'y suis. Archipauvre. Nu. Un policier vient m'arrêter. Il veut
savoir qui je suis. Il veut mon IDENTITÉ. Partons de là. Il me faut une preuve. On me la
prête, on me la donne ou on me la vend. Elle est, ici, attention, légitime et correcte
ou pas. Notre monde offre en ce moment des faiblesses élémentaires au chapitre de
l'identité. Cette faille s'observe même dans les pays développés. L'humanité ne se
contentera pas de dresser le seul inventaire des machines, me comprenez-vous ?
« Voici mon plan. Généalogiste amateur, j'ajoute à des renseignements familiaux qui
remontent à l'an 1200 ; je suis en mesure de prouver que nous avons subi des préjudices
et que certaines autorités civiles et religieuses ont mal assumé leurs responsabilités.
J'ai hérité d'un problème, je m'en occupe. Il appert que les ennuis qui en découlent
touchent plusieurs milliers de personnes vivantes, et j'ai su les intéresser au cas. Je
me demande en ce moment si une réclamation de six milliards de dollars suffira. Notez que
je tiens à un vieux principe : je pourrais changer d'avis ; changer d'avis quand les
faits le justifient, c'est ce qui est normal.
« N'ayez crainte, je ne me fais pas d'illusion. Ce n'est pas d'une victoire juridique
supplémentaire que j'ai le plus besoin. Seul un miracle ou une solution trouvée par des
personnalités dont la compétence dépasse celle des guérisseurs que je rencontre
habituellement saurait parvenir à effacer les traces et les effets de la tragédie.
Sinon, plus ou moins comme vous, je mourrai bientôt, ce qui, actuellement, constitue un
phénomène banal. »
Les invités bougent, mal à l'aise, sentant bien que les problèmes physiques de DX l'ont
rendu amer.
DX, lucide, s'excuse de sa longue sortie et lance subitement avec un sourire légèrement
moqueur : « Au fait, d'assez longs écrits philosophico-théologiques, qui remonteraient
à plus 30 000 ans, est-ce que ça vous intéresse ? Puisque notre soleil luit encore dans
l'univers, les circonstances nous permettraient sans dout de faire bientôt une excellente
étude ! Alors ? »
(Version du 25 juin 1995)
Copyright 1995 Gilles Dignard
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